Un trauma transgénérationnel
Dans ce super film, on voit comment un trauma se transmet à tout une famille. La matriarche, Alma a vécu un évènement terrible et elle en a développé un beau gros psychotrauma.
Le résultat, c’est qu’elle tient d’une main de fer sa famille, quitte à prononcer la mort (sociale) de ses éléments perturbateurs, genre son fils ou sa petite-fille, Mirabel. Ouch 🤕
C’est cette dernière qu’on va suivre tout le long du film. Pour Alma, tout doit être parfait : ben oui, elle a besoin de tout contrôler pour que tout le monde soit en sécurité. Le gros problème avec sa petite-fille, c’est que non seulement elle a pas de pouvoir magique comme les autres, mais en plus elle met le doigt sur les fissures et pose des questions. Ça, faut surtout pas le faire, ça ébranle tout le système ! 😱
Un système basé sur du traumatique, c’est souvent hyper rigide. Le comportement de Mirabel déclenche une activation traumatique chez Alma, parce que tout peut éclater : elle était déjà pas mal en mode survie, ça arrange pas du tout du tout les choses…
Une condamnation à mort
Mirabel risque la condamnation à mort ☠️.
Quoi ?
Oui, la mort sociale, l’exclusion quoi. Comme son oncle, Bruno.
Pour l’être humain, c’est le pire du pire : on est prêt à faire énormément de choses pour éviter d’en banni du groupe familial, social… Bruno, il est parti de lui-même, mais il a pas mal été poussé par sa mère, Alma, qui d’ailleurs impose un interdit strict : on ne parle pas de Bruno.
Dans la vie réelle, ça peut aller plus loin : là on voit toujours son portrait sur les murs, Alma le compte toujours parmi ses enfants. Parfois, l’exclu·e est vraiment rayé·e de la famille, des albums photos, presque de l’arbre généalogique !
Une famille toxique
En fait, si tu regardes la dynamique de cette famille, elle est, comment dire… toxique. ☣
Yep. Écoute la chanson de Luisa, Sous les apparences, tu vas comprendre tout de suite. D’ailleurs, son comportement montre une réaction typique au psychotrauma : faut être forte, très forte, montrer aucune faiblesse.
T’as Isabela aussi qui te montre une autre réaction au psychotrauma, plus dans le « fais plaisir ». C’est celle qui est jolie, elle apportera pas grand-chose par elle-même, c’est son mariage qui sécurisera la famille. Alors elle doit être parfaite : toujours belle, très princesse, qui répond aux codes de la féminité. Mais c’est pas elle, ça. Elle le fait parce que c’est ce qu’on attend d’elle et que la punition, la mort sociale, serait insupportable. Elle se conforme, se plie aux injonctions en oubliant qui elle est et en devenant peste, parce que ça fait mal de cacher qui on est.
Une guérison
Mirabel, de plus en plus rejetée, embrasse sa mission : lever le voile sur les conséquences du comportement traumatique d’Alma, pour ses enfants, ses petits-enfants, et casser le cycle du psychotrauma. C’est un Disney, je pense pas te spoiler en te disant que ça se termine bien 😁 ! C’est pas toujours aussi facile dans la réalité, mais c’est possible.
Elle parle de ce dont il fallait surtout pas parler, va chercher le pourquoi, pose des questions dérangeantes, fait tomber le système pour révéler autre chose. Montrer qu’il y avait de la peur et qu’il y a de l’amour. Toujours là, juste enfoui, caché sous la souffrance.
Une méchante ?
Certains disent que Alma est la méchante, parce que Disney met toujours un méchant.
Oui mais non. Elle a eu un comportement toxique, oui, elle a pris de mauvaises décisions, est devenue gardienne des interdits, a imposé un idéal de perfection, mais non, ça ne fait pas d’elle quelqu’un de mauvais.
Ses actions étaient mauvaises. Tu peux pas l’ignorer, même si ses intentions étaient bonnes. Elle voulait pas faire souffrir sa famille, juste la protéger à tout prix, mais le prix à payer les a fait souffrir.
Non, ça fait pas d’elle quelqu’un de mauvais. D’ailleurs, spoiler, elle change.
Un cerveau englué
Le problème d’un cerveau englué dans un psychotrauma, c’est qu’il réfléchit pas très bien, comme si le champ de vision était rétréci.
Je trouve qu’on gagnerait à arrêter de classer les personnes entre bonnes et mauvaises. Alma a eu un comportement toxique, oui. Complétement lié à son psychotrauma : c’est pas une excuse ni une justification, c’est une explication. Tu peux choisir de la blâmer, de la voir comme méchante, mais ça va pas changer ce qu’elle a fait. Ça risque aussi de freiner sa guérison et la guérison de la famille.
Attention, ça veut pas dire qu’il faut accepter tout comportement toxique sous prétexte d’une souffrance : non, évidemment. Pour casser le cercle vicieux du trauma, il faut sortir du jugement. Se protéger des comportements toxiques, oui, parfois en partant, sans haine, sans rancune. En posant les choses, en mettant des mots dessus. Surtout pas minimiser en disant « c’est pas grave, elle souffre, c’est comme ça » !
Une contradiction ou pas
En fait, dire que Alma a eu un comportement toxique ET qu’elle a protégé sa famille, c’est pas incompatible du tout. C’est même la réalité. « Mirabel peut la tenir responsable et être reconnaissante pour son labeur et son sacrifice » (Mariam Georgis, clique ici pour lire l’article en anglais). Chez les êtres humains, c’est pas binaire, 0 ou 1.
Alma a fait ce qu’elle a pu pour gérer son psychotrauma non traité, sa souffrance immense, et trois bébés toute seule (des triplés quand même !). Ça a conduit à de la souffrance supplémentaire ET de la sécurité physique. C’est essentiel de réaliser les conséquences que ça a eu, les bonnes et les mauvaises. Alma n’est pas la méchante.
Puis, si tu vas plus loin, est-ce que le méchant dans l’histoire c’est pas la guerre ?
Des traumas
Toutes les familles sont différentes, tous les traumas sont différents. Ce qui est fait pour protéger un proche est parfois bien pire que ce qu’Alma a fait. Je préfère l’acceptation au pardon : accepter que les choses ont été comme elles ont été, sans les juger ni les minimiser.
Encanto, c’est un beau film qui montre que ce qu’on fait pour ignorer, effacer, oublier le trauma, ça marche pas, et il se transmet. Que lever le voile sur les secrets, sur les souffrances, ça permet de guérir et raconter son histoire différemment.
C’est une belle façon de faire comprendre à tes client·es l’impact du trauma transgénérationnel, intergénérationnel.
Par contre si t’es pas formé·e au psychotrauma, pense à les rediriger vers quelqu’un. C’est pas si simple ni si évident que ça à traiter 😉
(un point bonus pour le fait que Mirabel a des lunettes de vue🤓, qu’elle garde tout le long du film !)